Harajuku le dimanche
Shinjuku est le quartier d'amusement pour les adultes, Shibuya est celui pour les jeunes, et Harajuku est le royaume des adolescents. Ce quartier se trouve entre Shinjuku au nord et Shibuya au sud, et entre Omote Sandô d'un côté et le parc de Yoyogi de l'autre. C'est pour moi l'endroit parfait pour voir les deux extrêmes du Japon, le traditionnel avec le temple Meiji (Meiji Jinguu) consacré à l'empereur Meiji) et l'ultra-moderne avec Takeshita Dôri et les diverses contre-cultures des adolescents japonais.
Harajuku le dimanche a toujours été très intéressant et très amusant.
C'était vraiment sympa quand la rue principale devant le parc était fermée à la circulation le dimanche et offerte aux diverses bandes de rock'n'roller des années 50, aux autres groupes de pop japonais et leurs haut-parleurs toujours réglés trop fort, et surtout aux nombreux Takenoko-zoku -- les tribus de jeunes bambous du début des années 80. Ceux-ci ont sans doute été les premiers adolescents rebelles médiatisés de l'après-guerre au Japon. C'était souvent des marginaux occupés à fumer (ouh là!), allumant des pétards (ouh là là !), et paraissant "contre". Ils étaient habillés de façon étrange et drôle. Ils dansaient en groupe et s'amusaient (ou essayaient de s'amuser) dans les limites admises par ce qui était tout de même une société avec un système très rigide. Ils ont commencé par étonner leurs aînés, mais bientôt ils ont été récupérés par la société car le matérialisme ambiant était simplement trop fort. À partir de là (nous étions, ne l'oubliez pas, au début des années 80), plusieurs magasins sont apparus pour répondre à ce nouveau petit marché de consommateurs. Je ne suis pas vraiment sûr, mais je suppose que c'est à partir de là que la "mode" et le "style" de Harajuku se sont répandus.
Aujourd'hui, je redécouvre ce quartier avec la même stupéfaction et le même plaisir. La rue principale reste malheureusement ouverte à la circulation (je suppose que de ne pas bloquer la circulation le dimanche fut une manière assez simple d'éliminer les rassemblements). Les Takenoko ont grandi, se sont mariés et ont certainement rejoint de bonnes sociétés japonaises. Mais leurs enfants sont toujours dans les rues de Harajuku le dimanche.
Ils suivent la nouvelle culture de rue et la mode de Harajuku. Nous pouvons voir divers styles bien définis (que je n'ai aucun doute sont tous presque totalement dictés par des magazines.) Et oui, un coup d'oeil dans une publication récente sur Tokyo me confirme ce que je pensais :
Voici les divers groupes:
- les Lolita, portant de mignons petits vêtements avec lacets
- les Lolita Gothiques, présentant une bonne coordination entre le noir et le blanc
- les Décoratifs, avec nombreux accessoires voyants et colorés
- les Punk Romantiques, un croisement entre une apparence romantique et dure
- les Zippers, un style copié sur magazine à la mode
- les Fluffy (Pelucheux ou Kigurumin), qui personnifient un héro de BD
- les Uniformes (Seifuku-kei), qui essayent de s'affirmer tout en portant l'uniforme de leur école
La scène est vraiment étrange car l'endroit est devenu un coin touristique célèbre. D'un côté, nous avons ces jeunes habillés comme dans les magazines ou les manga, discutant avec leurs copains qui sont habillés de la même manière (toujours en groupe). Et de l'autre, des photographes, Japonais et étrangers, regardant et prenant des photos. Certains des jeunes acceptent volontiers de se laisser photographiés, alors que d'autre préfèrent éviter les photos.
Le Japon est vraiment un pays étonnant et merveilleux.
(Toute la série des photos est visible sur http://www.flickr.com/photos/patosan/sets/1799767/)